Les invariants
Il y a-t-il, en arrivant au terme de cette exploration de figurations remarquables, où les phénomènes d’ambiance sont représentés, des invariants, des images prototypiques pour le vent, le soleil et la lumière, la température et le son ? Si ces prototypes existent, ils pourront être utilisés dans la construction des topiques d’ambiance (voir le chapitre concernant ce thème) et plus généralement dans les phases de référencement du projet, en accompagnement d’autres éléments graphiques ou textuels.
Les invariants sont en quelque sorte les atomes d’ambiances, les ambiantités comme cela a déjà été nommé plus haut. C’est ce qui reste lorsque l’on retire à l’image son principe de composition et de cadrage et la co-présence des séries. On retrouve donc, le mode d’expression graphique propre et les couleurs.
Les invariants du son
En dehors des icônes et du système de notation symbolique, il est possible de déterminer des invariants graphiques. Ces invariants sont de deux types, ceux concernant le phénomène lui-même et sa représentation, et ceux concernant les effets du phénomène. Pour simplifier, plus l’image se veut «réaliste», plus il est fait appel aux effets, plus elle se veut «explicative», plus il est donné à voir les phénomènes. Il est important de noter que dans les deux cas, les figurations sont descriptives.
L’onomatopée | Source et direction | Source et diffusion | Ondelettes | Effets induits |
Les sons sont écrits autant que dessinés, une onomatopée transcrivant chaque type de bruit. Les sons se diffusent par segments ou ondes concentriques ou ondelettes depuis la source. Un son violent détruit les objets (même l’objet émetteur) et les êtres à proximité.
Les invariants de la température
Les invariants de la température se répartissent entre lieux très chauds et très froids. Entre ces deux extrêmes, la température ne joue plus un rôle déterminant dans la scène et donc dans la représentation.
Le chaud
Accessoire | Transpiration | Signes de mort | Ombres | Diffusion et volutes |
Le chaud se manifeste sur les individus par des réactions corporelles, transpiration, brouillage de la vue. On se protégera par divers accessoires, chapeau, lunettes noires. Les contrastes sont violents, les ombres profondes et verticales et peuvent apparaître par taches (ombres panthère). Des signes extérieurs souvent macabres indiquent que l’endroit est soumis à une chaleur hostile. La chaleur se diffuse par volutes.
Le froid
Visage gelé | Goutte au nez | Couleurs diffuses | Signes de mort | Silhouettes engoncées |
Le froid se manifeste sur les individus également par des réactions corporelles, visage bleui, goutte au nez. On s’en protège par de lourds vêtements rendant la silhouette lourde et maladroite. Les tons sont homogènes, les contours des objets peu affirmés, les ombres rares. La profondeur de champ est faible. Les signes de vie sont rares s’ils ne sont pas humains, souvent symbole de périls.
Les invariants du vent
Les invariants du vent se répartissent entre représentation du phénomène et représentation des effets. Il arrive que les deux soient superposés.
Le phénomène
Lignes | Rose | Flèches | Nuée | Visage |
Le vent est figuré par des particules en mouvement, des lignes ou des flèches. Plus sage, la rose des vents donne les directions. Le vent est aussi incarné par un visage joufflu.
Les effets du phénomène
Objets soufflés | Intempéries | Ebouriffement | Déséquilibre | Destructions |
Les effets sont surtout donnés quand les vents sont violents. Les drapeaux se lèvent, les nuages s’amoncellent, les coiffures s’ébouriffent, les silhouettes vacillent et les objets s’envolent. Si le vent est trop faible, il n’est pas représenté.
Les invariants du soleil
Le soleil est très présent dans les représentations, même si son rôle est mineur dans la définition du lieu. A présence du soleil, comme dans les dessins d’enfants, indique la position du ciel, le haut du dessin donc. Il a donc moins un rôle descriptif qu’une présence rassurante dans l’image : la scène se passe dans un monde connu, en plein jour. Lorsque des auteurs veulent instaurer un décalage, ils perturbent l’image du soleil. L’imagerie de science-fiction est riche de ces mondes, fidèles copies des paysages terrestres, mis à part le soleil, qui apparaîtra en double ou triple, vert ou rouge, gigantesque ou annelé.
Le soleil
Rayons | Rayons et source | Soleil | Rayons sombres | Soleil total |
Le soleil se manifeste sa seule présence rayonnante, et / ou par ses rayons filtrés, dirigés et contrôlés. A noter une nette propension dans l’imagerie [pseudo]scientifique à figurer les rayons lumineux avec des trames sombres.
La lumière
Halo délimité | Halo rayonnant | Lumière crépitante | Lumière et flèches | Halo total |
Contrairement au soleil, la lumière décrit des sources ponctuelles émergeant d’un environnement sombre. Cette lumière est déterminée par le halo qui l’entoure et par le pinceau lumineux, ces deux éléments précisant l’intensité et la direction. Le halo peut avoir une frontière nette ou floue, la lumière peut être stable ou irrégulière.
Les ombres
Douces et faibles | Contrastées | Géométriques | Tachetées | Silhouettées |
Que la lumière soit naturelle et solaire ou artificielle, les ombres développent leur propre monde. Elles peuvent être douces, presque invisible comme en hiver, ou dure et contrastées quand la source est violente, d’une géométrie très complexe sur les modénatures architecturales, tachetées ou zébrées lorsque la lumière filtre à travers une grille, un rideau ou un feuillage, silhouettées, reproduisant nettement les contours de l’objet ombré. Il manque à cet inventaire les ombres issues des traitements numériques. C’est qu’elles sont à fois tout cela et rien de cela. Si c’est de la représentation, il faut user de stratagèmes pour reproduire toute cette richesse, mais le résultat est garanti. Dans ce cas, c’est de la peinture numérique. Si ce sont des images analytiques, les subtilités disparaissent. Il n’est par exemple pas possible de définir une ombre douce d’une ombre dure.
Les invariants numériques
Les invariants numériques sont les types de traitement utilisés pour décrire les phénomènes. La particularité de ces invariants est d’être indépendant du sujet qu’ils traitent. Quel que soit le phénomène (sauf le vent), c’est la même figuration qui est employée.
Spectre | Spectre doux | Vecteurs | Nuage | Volume |
Le spectre est le dégradé de couleur qui dans deux dimensions utilise une échelle par intervalle (passage franc entre deux groupes de valeurs). Le spectre doux offre un dégradé continu. Les vecteurs sont des petits segments (ou des flèches) qui indiquent, par leur densité et leur orientation, comment un phénomène occupe l’espace. Le nuage participe du même principe, sauf que la direction n’est pas indiquée. Le volume (ce peut être aussi une surface) est un groupe d’isovaleurs représenté dans l’espace.